Le blog de C-Campus

Comment aligner la stratégie de formation sur les priorités de l’entreprise ?

Dans un article récent, Marc Dennery faisait le point sur les opportunités qui se présentaient à la fonction formation en cette période de crise sanitaire. Il en ressort, clairement, que les professionnels de la formation ne risquent pas de se tourner les pouces, tant les défis sont nombreux. À la sortie de la crise, un autre défi sera, plus que jamais, d’optimiser les budgets de formation. Il est en effet probable que, à la reprise, il soit demandé aux directions de formation de réduire les budgets, de prioriser et de ne conserver que les formations réellement nécessaires, etc. Parallèlement à cela, les besoins en matière de développement des compétences seront gigantesques : il s’agira par exemple de faciliter le redémarrage des activités, de repenser les organisations du travail (le télétravail organisé en urgence sera passé par là…), de transformer les métiers, d’accompagner les évolutions professionnelles, etc.

En résumé, il sera demandé aux professionnels de la formation de faire plus avec moins. Pour cela, le maître-mot est la priorisation. Pour ce faire, plus que jamais, il leur appartiendra de travailler avec les parties prenantes clés, avec leurs commanditaires, donc généralement avec les directions (générale et/ou opérationnelles), bref, avec les personnes qui décideront accessoirement de l’avenir de la fonction formation dans l’entreprise et de l’allocation des budgets. L’objectif ? S’assurer que la stratégie de formation soit bien alignée sur celle de l’entreprise, donc sur les objectifs organisationnels. Tout ce qui ne sera pas aligné sera considéré comme superflu, accessoire, non essentiel.

Voici quelques conseils à suivre pour prioriser et/ou reprioriser ses formations, à l’aune de ce contexte économique.

Connaître son entreprise

Cela peut sembler une évidence, et pourtant… Je me souviens encore de ce conseil d’un enseignant, DRH de profession, qui affirmait que pour identifier un “bon” DRH, ce qui sous-entendait dans ses critères qu’il était “connecté au business” (pour le cas présent dans une entreprise de type “b to b“), il lui demandait systématiquement quels étaient les trois principaux clients de l’entreprise et ses trois principaux fournisseurs. Et, de sa propre expérience, les réponses justes étaient assez rares…

Pour savoir “ce qui empêche la direction générale de dormir”, il faut nécessairement passer du temps auprès des directions, des managers, des opérationnels… et pas uniquement à l’occasion de quelques rituels de la profession (par ex. la présentation du plan de formation/de développement des compétences, la collecte d’informations issues des entretiens annuels et/ou professionnels, etc.). En plus d’accroître votre légitimité interne, vous gagnerez également le respect de vos interlocuteurs en partageant leurs préoccupations.

Cela peut se faire de manière très simple, par exemple en proposant régulièrement à des managers de déjeuner avec eux, de partager un café, de participer à l’une de leurs réunions, etc. Il peut s’agir aussi de participer à des audits, de rencontrer des clients (par ex. à l’occasion de visites d’entreprises), etc. Les occasions sont nombreuses et tout prétexte est bon à prendre pour “arpenter le terrain” et “sentir” les priorités.

Vous parlerez ainsi plus facilement leur langage et, notamment, le langage commun de l’entreprise : celui du chiffre. Car il n’y a qu’au sein de la fonction formation que l’on s’intéresse au CPF, à la Pro-A, aux MOOC, COOC, SPOC, et autres acronymes, à la différence entre savoir, connaissance, capacité, compétence, comportement, etc. Les “gens du terrain” n’en ont que faire et nous, en tant que fonction support, nous tenons notre légitimité de la valeur ajoutée que nous apportons aux opérationnels. Alors faisons cet effort d’aller à la rencontre, sans attendre que cela soit eux qui viennent. Et parlons de ce qui les intéresse : leurs objectifs, leurs problématiques, leurs difficultés, etc.

Identifier les priorités organisationnelles

Maintenant que le contact est établi (ou rétabli), votre objectif sera d’identifier les priorités du moment. L’idéal est de pouvoir questionner des responsables de différents niveaux hiérarchiques et de différents secteurs/départements.

Les questions ci-après ne sont que des suggestions, il ne s’agit en rien d’une liste exhaustive :

  • Quelles sont vos priorités à court terme ?
  • Quels sont les défis auxquels vous êtes confronté(e) ?
  • Vos collaborateurs sont-ils préparés pour les relever ?
  • Dans le cas contraire, quelles sont les compétences manquantes ? Quelles sont les bonnes pratiques que vous aimeriez voir à l’œuvre dans votre équipe ?

À l’aide des informations recueillies, il sera temps d’établir une note de synthèse. Il n’est pas nécessairement question ici de la note d’orientation, liée au plan de formation / plan de développement des compétences, même si les échéances classiques (consultation des partenaires sociaux, présentation du plan, etc.) ne seront peut-être pas éloignées dans le temps du moment de la reprise. Ici, il s’agit de rédiger une note en réponse aux urgences et priorités du moment.

Cette note de synthèse pourra comprendre les éléments suivants (là encore, la liste n’est pas exhaustive) :

  • La vision de la fonction formation : comment la formation peut-elle être un levier de soutien de l’entreprise et de développement de sa performance ?
  • Les objectifs organisationnels : quels sont les objectifs et priorités de l’entreprise auxquels va contribuer/répondre la fonction formation ?
  • Les projets/programmes : quels sont les principaux projets de formation que vous proposez d’engager ?
  • Les ressources nécessaires : quels sont les moyens requis pour s’assurer de la réussite de ces projets ?
  • Le calendrier : quelles sont les échéances principales pour chacun des projets principaux ?

Embarquer les acteurs

Cette note sera présentée aux différents responsables rencontrés, idéalement à l’occasion d’une réunion de présentation les rassemblant.

En amont de cette présentation :

  • Envoyez une invitation à l’ensemble des hauts responsables/dirigeants (y compris le PDG si possible) et, évidemment à l’ensemble des responsables que vous avez rencontrés.
  • Passez en revue votre stratégie / note de synthèse avec votre équipe. Demandez-leur de se faire les “avocats du diable” afin de travailler vos arguments. Essayez de bannir toute forme de jargon pédagogique de vos propos.
  • Pour s’assurer le soutien de certains sponsors, n’hésitez pas à présenter votre note en amont à quelques-uns des responsables que vous avez interrogés afin d’avoir leurs retours, de bénéficier de leurs conseils et, ainsi, le jour de la présentation, de disposer d’alliés dans la salle.

Le jour de la présentation :

  • Proposez la constitution d’un comité de pilotage pour suivre l’exécution de ces projets et leurs résultats. C’est une condition nécessaire pour obtenir des effets tangibles (notamment en termes de transfert des acquis et d’impact sur les résultats, donc aux niveaux 3 et 4 du modèle de Kirkpatrick), via notamment la mise en place d’actions correctives si les résultats ne sont pas au rendez-vous.
  • Insistez sur la nécessaire coopération des autres fonctions (dont plusieurs représentants pourraient participer au comité de pilotage), tant il est vrai que la fonction formation, comme les autres, n’est qu’une partie d’un tout. Une organisation est un système, c’est le tout qui a de la valeur. Les parties, considérées de manière indépendantes, n’en ont aucune.
  • Si vous rencontrez des difficultés à faire adhérer vos commanditaires principaux, proposez un programme pilote avec un petit groupe et expliquez que vous souhaitez travailler avec eux pour évaluer les impacts de ce programme afin que cela serve aux futurs programmes. Pour chacun de ces programmes à forts enjeux, vous pourrez dérouler la démarche du retour sur les attentes (ROE) afin d’en démontrer la valeur ajoutée.

Voyez cette note de synthèse comme une feuille de route. De ce fait, il s’agit d’un document prévisionnel tout à fait susceptible de changer dans le temps. Et cela n’est pas grave ! L’idée est de mettre en perspective les choses, d’engager les acteurs, mais sans se fermer aux changements. Oui à la planification, non aux plans (rigides).

L’objectif de cette étape est aussi d’anticiper, d’aller au-devant, de prendre des initiatives… sans attendre que ce soit les opérationnels qui viennent nous chercher ! Sans quoi, votre position sera celle d’un preneur de “commandes” et vous ne serez pas vu comme un véritable partenaire d’affaires. Si vous n’êtes pas déjà régulièrement convié(e) aux comités exécutifs, les choses pourraient changer en adoptant une posture de ce type…

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Jonathan Pottiez

Jonathan Pottiez

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