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Qualiopi vs Datadock : qu’est-ce qui va changer ?

Le décret du 6 juin 2019 fixe pour tous les organismes de formation souhaitant bénéficier de co-financements publics l’obligation de respecter le nouveau Référentiel National de Qualité dit “Qualiopi”. Cette obligation sera effective à compter du 1erjanvier 2021 pour les organismes de formation continue et du 1erjanvier 2022 pour les prestataires de formation en apprentissage en activité avant la loi Avenir professionnel. Davantage qu’une simple amélioration du Datadock, le nouveau référentiel qualité invite les organismes de formation et CFA à changer de logique. Il les fait entrer de plain-pieds dans le monde de la qualité.

D’un contrôle a posteriori à un contrôle a priori

Le changement le plus important du passage du Datadock à Qualiopi réside dans la nature du contrôle, plutôt que dans le nombre et le type des exigences. D’une manière générale, la logique du Datadock reposait sur l’obligation pour l’organisme de formation de faire la preuve de sa « capacité à décrire » son organisation, ses processus et sa prestation. Dès lors qu’il était capable de documenter le Datadock, il était reconnu comme organisme de formation de qualité et par conséquent référencé. Seul un contrôle a posteriori pouvait alors lui faire perdre le référencement.

Il en est tout autrement avec Qualiopi. Les OF et CFA vont devoir faire la preuve, à l’occasion d’un audit qualité mis en place selon les règles du COFRAC, qu’ils respectent les 7 critères et 32 indicateurs de Qualiopi. On passe ainsi d’un contrôle a posteriori à un contrôle a priori.

De surcroît, les exigences fixées ne sont plus de l’ordre de la « capacité à décrire », mais du « faire, documenté et prouvé ». A ce titre, il est amusant de voir que les deux référentiels, Datadock et Qualiopi, traitent à peu près des mêmes thèmes. C’est seulement la rédaction qui diffère, mais cela change tout.

Indicateur 2.5 Datadock : « Capacité de l’OF à décrire l’évaluation continue des acquis du stagiaire » vs Indicateur 11) Qualiopi « Le prestataire évalue l’atteinte par les publics bénéficiaires des objectifs de la prestation ».

D’une adaptation de la formation à la personnalisation du parcours

Les rédacteurs du référentiel Datadock ont pour la première fois amené les financeurs à avoir un droit de regard sur la pédagogie des OF. Leur parti pris tourné autour de l’adaptation de l’action de formation au besoin du client. Le Qualiopi va plus loin et va conduire les OF et CFA à passer d’une logique d’adaptation à une logique de personnalisation. Dans le premier cas, la prestation doit s’adapter à la demande client qui est le plus souvent collective, dans le second, elle doit être adaptée au bénéficiaire final, c’est-à-dire à l’apprenant pris en tant que personne.

C’est patent par exemple lorsqu’on compare l’indicateur 1.3 du Datadock : « Capacité de l’OF à décrire et attester de l’adaptation des modalités pédagogiques aux objectifs de la formation » avec l’indicateur 10) de Qualiopi : « Le prestataire met en œuvre et adapte la prestation, l’accompagnement et le suivi aux publics bénéficiaires ».

Et pour renforcer cette évolution, les rédacteurs de Qualiopi sont allés plus loin en rajoutant de nouveaux thèmes relatifs à la personnalisation tels qu’à travers l’indicateur 12) « Le prestataire décrit et met en œuvre les mesures pour favoriser l’engagement des bénéficiaires et prévenir les ruptures de parcours » ou l’indicateur 19) « Le prestataire met à disposition du bénéficiaire des ressources pédagogiques et permet à celui-ci de se les approprier ».

D’une description des actions de développement des compétences réalisées pour ses intervenants à un management des compétences de tous les contributeurs à la prestation

A travers les trois indicateurs du critère 4, le Datadock n’était pas très exigeant concernant la qualification des intervenants. Il était focalisé sur les seuls formateurs. Là aussi, le Qualiopi va beaucoup plus loin à travers ses deux indicateurs (n°21 et 22) du critère 5 et l’indicateur n°27 du critère 6 sur la sous-traitance.

On passe une nouvelle fois d’une logique déclarative et de constat (« on met à jour une base des expériences et des qualifications », on « atteste d’actions de formation », on « produit des références » à la preuve de la mise en place d’une organisation dédiée, à une logique de preuves tangibles.

Indicateur 21) Le prestataire détermine, mobilise et évalue les compétences des différents intervenants internes et/ou externes, adaptées aux prestations.

Indicateur 22) Le prestataire entretient et développe les compétences de ses salariés, adaptées aux prestations qu’il délivre.

Indicateur 27) Lorsque le prestataire fait appel à la sous- traitance ou au portage salarial, il s’assure du respect de la conformité au présent référentiel.

Les OF et CFA qui ne mettront pas en place un système de management des compétences à la fois des intervenants et de toutes les personnes impliquées dans le dispositif formatif ne pourront obtenir leur certification. Les cordonniers ne seront plus les plus mal chaussés ! Les formateurs et personnels supports à la formation seront, comme dans toutes les entreprises, sélectionnés, formés, accompagnés, développés.

Le Qualiopi va même plus loin à travers son indicateur « 28) Lorsque les prestations dispensées au bénéficiaire comprennent des périodes de formation en situation de travail, le prestataire mobilise son réseau de partenaires socio- économiques pour co-construire l’ingénierie de formation et favoriser l’accueil en entreprise ». Il invite les OF et surtout les CFA concernés en priorité par cet indicateur à piloter de l’extérieur la formation qui est mise en œuvre en interne au poste de travail dès lors qu’il y a co-financement.

L’invitation sous-jacente à mettre en place une démarche qualité

Quand on analyse les 7 critères et 32 indicateurs du nouveau Qualiopi, on s’aperçoit très vite que répondre à chacun des critères ne sera possible que si préalablement à toute action est mise en place une démarche qualité. Que ce soit pour faire la preuve d’une information fiable sur l’offre de formation, d’une adaptation aux bénéficiaires des parcours, d’un accompagnement des salariés et intervenants externes, de l’animation de la veille et évidemment de la démarche d’amélioration qualité, on sent bien que l’OF ou le CFA devront s’organiser dans le domaine de la qualité. Cela signifie concrètement :

  • Nommer un responsable ou chargé de mission qualité,
  • Mettre en place un comité de pilotage qualité
  • Animer des groupes de travail sur la cartographie et l’évaluation des processus,
  • Animer des groupes d’amélioration continue sur les résultats des évaluations
  • Décrire sa politique et son organisation qualité à travers si possible un manuel qualité
  • Etc.

Bref, le monde de la formation va entrer ainsi de plain-pied dans l’univers de la qualité totale. Près de 40 ans après l’industrie et notamment l’industrie automobile, de nombreuses années après le Bâtiment, l’Hotellerie ou les services de télécommunications pour ne citer que quelques secteurs emblématiques, les entreprises de formation vont devoir se mettre sérieusement à la qualité. Cela engendrera probablement, dans un premier temps, des coûts supplémentaires. Mais dans un second temps, cela permettra d’industrialiser peut-être un des métiers les moins tangibles qui soit : l’acquisition des connaissances et le développement des compétences de professionnels adultes.

Pour aller plus loin

Consultez le Datadock : https://www.data-dock.fr/documents/indicateurs.pdf

Consultez le nouveau référentiel qualité : https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/guide_referentiel_qualite_v3-22-07-19.pdf

 

Marc Dennery

Marc Dennery

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