Le blog de C-Campus

Organisme de formation : faut-il aller sur l’appli CPF ?

Au moment où le Gouvernement réunit les acteurs de la formation pour leur présenter ce que devrait être la prochaine application CPF la réponse ne va pas de soi.

A quoi servira l’appli CPF ?

Pour rappel l’application CPF doit permettre à tout titulaire d’un compte de connaître ses droits, choisir sa formation et s’y inscrire. Une fois la formation réalisée, l’organisme de formation sera directement réglé par la Caisse des Dépôt et Consignation et pourra suivre l’état d’avancement de ses règlements. Et tout ceci en quelques clics.

Quels seront les avantages de l’appli CPF pour les organismes de formation ?

L’application CPF présente trois avantages majeurs pour l’organisme de formation :

  1. Sécurisation du règlement de la formation : avec la Caisse des Dépôts et Consignation le risque d’impayé est quasi nul. La vieille dame a a priori les reins solides !
  2. Fluidité du processus de gestion : une fois le processus stabilisé, l’organisme de formation qui saura interfacer son système de gestion avec l’application CPF devrait dégager des gains de productivité administrative. Chaque entreprise, et même chaque OPCA hier, avait son propre système d’inscription, de commande, de facturation / règlement. Avec l’application CPF ce sera le même quel que soit le secteur ou la branche.
  3. Visibilité de l’offre sans perte de marge. L’application CPF va fonctionner comme une plateforme de désintermédiation non ré-intermédiée. Ce qui est particulièrement avantageux pour le producteur. En clair, comme sur les plateformes Booking.com, Airbnb, Uber, Spotify… les organismes de formation bénéficieront de l’avantage marketing. Mais cette fois-ci sans payer de contribution à la plateforme. Il y aura donc bien une désintermédiation : l’organisme de formation va entrer en contact direct avec l’apprenant, sans ré-intermédiation captant la valeur de mise en contact comme c’est le cas pour toutes les grandes plateformes.

Quelles seront les exigences de l’appli CPF et de son business model associé ?

En contrepartie de ces avantages loin d’être négligeables, les organismes de formation choisissant d’intégrer l’appli devront accepter quelques contraintes, elles aussi loin d’être légères :

Satisfaire aux règles de la formation professionnelle.

Cela va de soi, mais il vaut mieux le rappeler, pour figurer sur la plateforme l’organisme de formation devra respecter les exigences en vigueur en matière de formation, à savoir :

  1. Etre déclaré auprès de la préfecture et réaliser annuellement son bilan pédagogique et financier,
  2. Respecter les règles concernant notamment le conventionnement et la définition de l’action de formation,
  3. Etre labellisé par un organisme de certification cofraqué ou reconnu par France Compétences.

Tout ceci ne sera pas une difficulté pour les 55.000 organismes de formation datadockés, même s’ils devront franchir une nouvelle étape avec le label qualité. Et ils sont nombreux. Il n’y aurait aujourd’hui qu’environ 4.000 organismes labellisés sur 55.000 datadockés. Et les 4.000 labellisés devront dans tous les cas satisfaire aux nouveaux critères du futur décret qualité. Pour les autres organismes de formation (30.000 environ), la question se posera avec plus d’acuité.

Satisfaire aux exigences du CPF

Bien que les listes Copanef, Coparef et CPNE disparaissent, le CPF ne sera ouvert qu’aux certifications RNCP, RS (futur Répertoire Spécifique et ex-Inventaire), aux bilans de compétences, accompagnement VAE, permis PL/VL, et accompagnement création d’entreprise. Pour le dire rapidement, hors certification point de salut !

Satisfaire aux règles spécifiques de la Caisse des Dépôts et Consignation

L’application CPF va rajouter une couche d’exigence. Il est prévu par la loi, et un projet de décret va le préciser, que les organismes de formation souhaitant être référencés sur l’application CPF devront impérativement respecter les conditions définies par cette dernière. Et celles-ci devraient tourner notamment autour des points suivants :

  • Présenter son catalogue formation selon l’architecture définie par l’appli (ce qui reviendra probablement à avoir une gestion en double de son catalogue de formation).
  • Communiquer des données concernant la qualité de la formation : note d’appréciation, taux d’insertion dans l’emploi, Etc.
  • Respecter un délai de réponse suite à une demande d’inscription (on parle de 48h) et probablement d’engagement concernant la réalisation de la formation.
  • Faire avec les conditions de règlement de la CDC. On connaît celles des entreprises, des particuliers et des OPCA ou de Pôle Emploi, on ne connaît pas encore celles de la CDC. Peut-être seront-elles plus favorables, peut-être pas ?

Accepter peut-être demain la double voire multi facturation

Tant que le montant de la formation n’excèdera pas les droits acquis par le bénéficiaire, la question ne se posera pas. L’organisme de formation sera réglé intégralement par l’application. Dès lors que le montant de la formation excèdera celui des droits acquis, un ou plusieurs financeurs complémentaires pourront intervenir :

  • Le particulier qui a priori devrait régler lui-même le delta. Ce ne sera probablement pas simple à lui expliquer et le risque d’impayé ou de retard de paiement loin d’être négligeable.
  • L’entreprise elle-même ou médiatisé par son OPCO. Pour l’instant rien n’est garanti dans ce domaine. Le plus simple évidemment serait que l’application CPF règle l’organisme de formation et qu’elle appelle les fonds à l’entreprise ou l’OPCO.
  • Pôle Emploi pour les demandeurs d’emploi. Espérons pour les organismes de formation que là aussi l’application règlera directement l’organisme de formation et qu’elle appellera les fonds à Pôle Emploi ou tout autre financeur.

S’adapter aux contraintes d’un marché BtoC

Le marché du CPF sera un marché BtoC et non plus BtoB. Les organismes de formation auront donc à traiter, non plus avec l’entreprise, mais directement avec le salarié. Il faudra le renseigner, suivre son inscription, le relancer directement en cas de paiement partiel par l’application. Bref, là où il y a aujourd’hui pour des formations intra, un processus de gestion pour 8 à 12 personnes, il y aura demain autant de processus de gestion qu’il y a de participants.

Faire face au problème de TVA

Les montants de droits acquis sont de 500 euros par an (et probablement 14,28 euros pour la transformation du solde des droits acquis au 31/12/2018). Les organismes de formation soumis à la TVA vont se retrouver face à un problème de concurrence avec les organismes qui ne le sont pas. 500 euros TTC, cela revient à 416,66 euros Hors taxe. Sur une formation à 3.000 euros, le delta n’est pas négligeable. Bercy se penche sur la question. Il faudra prendre en compte sa réponse avant peut-être de se décider d’y aller ou pas.

En conclusion, y aller ou ne pas y aller ?

La réponse appartient à chaque organisme en fonction de son environnement particulier. Pour faire simple, les réponses des organismes de formation devraient se répartir de la façon suivante :

Y aller évidemment

Se retrouveront probablement dans cette catégorie les grands organismes de formation et les petits OF spécialisés dans les Langues, la Bureautique, le Cléa et ne l’oublions pas les auto-école VL / PL puisque les permis B et Poids lourds sont éligibles au CPF.

Pour les petits organismes de formation de Langues et Bureautique, c’est  pratiquement une question de survie, s’ils n’interviennent pas sur des publics Premium.

On retrouvera également les organismes de Branches quelle que soit leur taille, car cela peut s’apparenter pour eux à une logique de “mission de service public”.

Détourner son chemin

On retrouvera une liste d’organisme probablement très longue :

  • Les organismes non encore datadockés : contraintes administratives trop élevées,
  • Les organismes n’ayant pas d’offre certifiante : problème d’éligibilité au CPF,
  • Les organismes positionnés sur un marché Premium (conseil/expert) : certainement trop cher vu les montants CPF,
  • Les organismes n’ayant pas de catalogue inter : trop éloigné du marché BtoC,
  • Les organismes de petite taille : problème de visibilité sur l’application CPF (ils auront probablement du mal à apparaitre sur la première page de l’appli CPF surtout s’ils sont à Paris ou dans les grandes métropoles car l’application CPF prendra en compte différents critères pour son ranking dont la proximité).

Prendre le temps de la réflexion

On retrouvera dans cette catégorie les organismes de taille intermédiaire positionnés sur le marché des certifications RNCP ou inventaire. Il ne s’agira pas pour eux forcément d’un nouvel eldorado, mais si le CPF co-construit avec abondement de l’entreprise et/ou de l’OPCO décolle, ils ne pourront pas faire autrement que d’y aller sous peine de se faire sortir de leur coeur de marché.

La loi de 2018 aura les mêmes conséquences sur ces organismes que celle de 2014 avait eu sur les organismes de formation intermédiaires positionnés sur la formation intra auprès des grandes entreprises et ETI. Ils avaient été contraints de transformer leur offre en parcours certifiants. 4 ans plus tard, ils devront faire avec l’appli CPF. D’ailleurs, ce sont pour la grande majorité les-mêmes. Dans la formation faut savoir s’adapter !

Cet article a été publié sous forme de tribune sur news tank rh management. Pour découvrir les services de cette agence d’information globale, n’hésitez pas à demander un test gracieux de notre part en cliquant sur le lien ici.

 

Marc Dennery

Marc Dennery

The selected Optin Cat form doesn't exist.
Abonnez-vous à notre newsletter