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Quels sont les différents types de dispositifs favorisant l’engagement en formation ?

Nous avons traité, il y a tout juste un an de la question de l’engagement en formation de façon à la fois théorique et méthodologique dans un article de synthèse – cliquez ici pour le découvrir ou redécouvrir . Dans le présent article nous revenons sur ce thème de façon plus pratique en faisant une revue des principaux types de dispositif mis en place par les entreprises et les organismes de formation afin d’amener les apprenants à aller au bout de leur formation et à acquérir les connaissances et compétences prévus dans le parcours.

1-  Les dispositifs d’engagement centrés sur le plaisir d’apprendre

Le quiz et plus largement la ludopédagogie

Ces dispositifs sont très en vogue, portés par la vague du digital learning. Ils ne sont pas pour autant exempts de défauts. Les deux plus importants de ces défauts sont :

  • Le fait qu’ils ne fonctionnent bien que pour de l’acquisition de connaissance (à quoi servent des quiz pour développer des compétences de chef de projet ou de managers par exemple ?). La ludopédagogie au sens large peut permettre d’acquérir des savoir-faire mais cela reste plus compliqué pour des savoir-être.
  • Ils sont basés sur des principes « behavioristes » et laissent croire qu’il n’existe qu’un seul « one best way » en apprentissage. Or, la psychologie cognitiviste et plus récemment les neurosciences réfutent cette vision simpliste de l’apprentissage.

On veillera donc à ne les utiliser que dans le cas particulier des formations portant sur des connaissances simples : ex. offres commerciales, données techniques, etc.

Les pédagogies actives

Les pédagogies actives rendent l’apprentissage beaucoup plus plaisant que les pédagogies passives. C’est toujours plus agréable de chercher, discuter, analyser, pratiquer que d’écouter passivement un formateur ou consulter un vidéo learning. Elles jouent sur des leviers motivationnels tels que l’expérimentation, la curiosité, et le plaisir de partager (forum pour les formations en digital learning et travaux de sous-groupes pour les formations en présentiel ou à distance).

Ces dispositifs très engageants sont à privilégier. Mais il faut toujours garder à l’esprit qu’ils ne sont efficaces que s’ils sont bien mis en œuvre. L’activité doit être réelle (un simple échange avec le formateur apporte peu, un travail de sous-groupe est beaucoup plus riche par exemple), pertinente (en lien avec les objectifs de la formation) et surtout bénéficier de l’adhésion des apprenants (ils doivent garder le sentiment de faire une activité choisie et non pas subie). C’est pour cette dernière raison que des organismes de formation s’orientent aujourd’hui non plus seulement vers la multimodalité mais la comodalité.

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Le soin apporté aux environnements d’apprentissage

Le plaisir d’apprendre passe non seulement par la tâche d’apprentissage comme nous le venons de le voir, mais également par l’environnement d’apprentissage. Dans cette catégorie on comprend :

  • Le design des plateformes : fluidité, esthétisme, simplicité… (toutes les solutions de visio ne sont pas égales, ni toutes les LMS/LXP !)
  • La qualité des terminaux : un bon équipement de qualité (son, écran, design, fonctionnalités) est aussi un critère important d’engagement. Certains organismes de formation l’ont bien compris et peuvent être amenés à équiper eux-mêmes leurs apprenants).
  • La qualité des supports en formation. Les effets wahoo ! des diaporamas ne sont pas une solution miracle mais peuvent contribuer d’une certaine manière à favoriser l’engagement.
  • Les espaces pédagogiques présentiels : l’espace, le volume, l’ambiance visuelle, sonore et même olfactive contribuent au plaisir d’apprendre d’une manière loin d’être négligeable.

Les dispositifs d’engagement centrés sur l’environnement d’apprentissage apportent une réelle valeur ajoutée. Mais leur défaut majeur est d’être relativement onéreux. Avant de se lancer dans leur utilisation, il faudra faire une étude investissement/coût sérieuse.

2-  Les dispositifs d’engagement centrés sur le besoin en formation

Comme le disait si bien Bertrand Schwartz : « Un adulte n’est prêt à se former que s’il peut trouver dans la formation une réponse à ses problèmes dans sa situation ».

Autrement dit l’apprenant ne s’engage que s’il a un intérêt direct à acquérir les connaissances et compétences qu’on souhaite lui voir acquérir. Dans cette catégorie, on regroupe l’ensemble des démarches et outils qui permettent de donner du sens aux apprentissages, tels que :

  • Les démarches d’analyse du travail préalable qui permettent de bâtir des formations en lien direct avec l’activité des apprenants (ces dispositifs sont obligatoires dans le cadre d’une démarche d’AFEST par exemple)
  • Les outils de positionnement qui permettent à l’apprenant de prendre conscience de ses besoins de formation,
  • Les dispositifs de personnalisation qui permettent à chaque apprenant d’apprendre en fonction de ses besoins propres.
  • Les approches facilitant de synchronisation des formations. Encore assez peu développés aujourd’hui, ils devraient l’être dans les années à venir avec le développement du data learning. A partir des données sur les compétences et connaissances de chaque apprenant il sera possible demain de proposer dès que le besoin apparaît des parcours de formation aux apprenants et à leurs managers. On n’attendra plus le sempiternel plan annuel de formation pour déclencher le départ en formation.

Les dispositifs d’engagement centrés sur le besoin en formation sont particulièrement importants pour la réussite d’une formation. Car le sens que l’apprenant donne à sa formation lui permet de s’engager dans la durée. Si ce que j’apprends m’est directement utile je serai capable de produire des efforts nettement supérieurs que si mon intérêt n’est qu’indirect (éviter une sanction ou bénéficier d’une récompense comme dans le troisième type de dispositifs d’engagement ci-après).

3-  Les dispositifs d’engagement centrés sur la reconnaissance

Ce type de dispositif peuvent être classés en deux sous-catégories. Les premiers gravitent autour de la mise en place de système de reconnaissances positives (l’apprenant se motive parce qu’il pense grâce à la formation obtenir certains bénéfices). Les seconds autour de systèmes de reconnaissances négatifs (l’apprenant se motive parce qu’il craint les conséquences négatives d’un non engagement).

Les systèmes de reconnaissance positives :

On retrouve d’abord dans cette catégorie tout ce qui a trait à la validation et la reconnaissance des acquis et notamment la mise en place d’openbadges, de CCF (Contrôle Continue en Formation), de certifications (RNCP, RS, CQP, Qualification interne à l’entreprise).

Les entreprises les plus en pointe d’un point de vue social utilisent le levier du lien formation / rémunération / promotion. L’apprenant s’engage parce qu’il sait qu’il obtiendra des bénéfices en termes de développement professionnel.

Le système de reconnaissance peut être aussi simplement symbolique, comme, par exemple, quand il repose sur l’implication du management et/ou d’un tuteur dans le processus de formation. L’apprenant s’engage alors parce qu’il sait que son management ou un tuteur attend de lui qu’il réussisse la formation. Ces dispositifs d’engagement jouent du levier de l’attachement affectif (“A l’école, j’apprends pour faire plaisir à la maîtresse, au travail pour faire plaisir au manager !”).

Les systèmes de reconnaissances négatifs

Cette seconde catégorie comprend des dispositifs incitatif tels que les relances via des e-mail automatiques adressés par les plateformes ou plus coercitifs comme la suppression d’habilitation si la personne ne réussit pas sa formation (par exemple pour des métiers à risque ou réglementés).

Parfois les organismes de formation mettent en place des dispositifs plus subtiles comme par exemple la proposition de parcours conditionnels (si vous n’avez pas fait le E-Learning obligatoire, vous ne pourrez pas participer à la formation).

Ces dispositifs, qu’ils soient basés sur des systèmes de reconnaissance positive ou négative, restent dans l’ensemble moins performants que les dispositifs précédents car ils agissent seulement sur la motivation extrinsèque. Or les théories de la motivation ont fait la preuve que l’engagement est supérieur quand il repose sur des motivations intrinsèques (plaisir et intérêt direct.

4-  Les dispositifs d’engagement centrés sur le sentiment d’efficacité personnelle

Pour qu’un apprenant s’engage il faut qu’il ait le sentiment d’être capable de réussir sa formation. C’est ce que le psychologue canadien Albert Bandura a théorisé sous le terme de sentiment d’efficacité personnelle – cf. notre article de synthèse ici. De nombreux dispositifs d’engagement entrent dans cette catégorie :

  • Les dispositifs favorisant le calibrage de la difficulté de la tâche d’apprentissage en fonction des capacités de l’apprenant. Il s’agit des dispositifs de positionnement et de personnalisation déjà vus précédemment. On peut aussi faire entrer dans cette catégorie les pratiques de conception par objectif et de pédagogie différenciées.
  • Les outils d’auto évaluation et de feedback. Tout ce qui est mis en place pour permettre à l’apprenant de s’évaluer et valider ses progrès que ce soit de façon automatisés via des plateformes ou via des médiations humaines (tutorat, mentorat, évaluation entre pairs) contribuent à renforcer le sentiment d’efficacité personnelle si les dispositifs sont réalisés avec soin.
  • Les dispositifs d’encouragements via du tutorat ou mentorat ou encore du parrainage favorisent aussi l’engagement en renforçant le sentiment d’efficacité personnelle quand l’apprenant est face à des difficultés ou un échec.
  • Les modalités de co-formation (projets fil rouge à réaliser entre pairs, groupes d’entraide entre apprenants, etc.) favorisent quant à eux le sentiment d’efficacité collective. Les apprenants s’encouragent entre eux et savent qu’ils pourront réussir leur formation grâce à l’entraide mutuelle.

Les dispositifs d’engagement centrés sur le sentiment d’efficacité personnelle sont globalement encore peu pratiqués, exceptés ceux portant sur le calibrage de la difficulté des tâches d’apprentissage. La première raison est que la théorie de Bandura reste encore peu connue des ingénieurs en pédagogie et responsables de formation. La seconde est qu’ils sont relativement sophistiqués et coûteux à mettre en œuvre, faisant appel à du tutorat et mentorat.

5-  Les dispositifs d’engagement centrés sur les capacités à gérer son apprentissage

Des apprenants qui savent gérer leur apprentissage, c’est-à-dire s’organiser mais aussi détecter leurs difficultés d’apprentissage et trouver des solutions, sont souvent des apprenants qui abandonnent moins car ils apprennent mieux et dans de meilleures conditions. On peut dénombrer trois principaux types de dispositifs dans ce domaine :

  • Les dispositifs de remédiation, c’est-à-dire les dispositifs favorisant le traitement des difficultés d’apprentissage. En attendant l’IA qui nous permettra peut-être demain d’utiliser des assistants virtuels d’apprentissage comme on peut l’avoir aujourd’hui pour la conduite, ces dispositifs sont surtout mis en place via de la médiation humaine. Il peut s’agir de tuteurs ou d’accompagnateurs AFEST pour les formations en situation de travail et pour les formations blended learning d’accompagnateur / facilitateur pédagogiques.
  • Les dispositifs d’intégration au parcours. Certains organismes de formation, notamment l’AFPA pour ses formations longues, mettent en place des temps plus ou moins importants (de quelques heures à quelques jours) au cours desquels les apprenants se familiarisent avec leurs outils d’apprentissage (ENF ou Environnement Numérique de Formation), acquièrent des techniques et méthodes d’auto apprentissage, découvrent leur groupe de formation afin de s’y intégrer, etc.
  • Les dispositifs aidant à la planification des apprentissages. Très utilisé dans les MOOC, ces dispositifs consistent à planifier de façon très cadencées la formation afin que les apprenants puissent répartir au mieux leur charge d’activités d’apprentissage. Ce séquençage repend la logique des sprint des méthodes agiles.

Les dispositifs d’engagement centrés sur les capacités à gérer son apprentissage ne peuvent être utilisés que pour des parcours relativement longs (plusieurs mois en général). Ils semblent être peu pratiqués aujourd’hui pour des raisons assez proches de celles indiquées pour la famille de dispositif précédent (coût humain du tutorat, des périodes d’intégration…). Ils sont pourtant très efficaces car ils permettent de réduire considérablement le taux d’abandon en donnant les moyens aux apprenants d’appliquer de meilleures stratégies d’apprentissages.

6-  Les dispositifs d’engagement centrés sur le transfert pédagogique

Acquérir des connaissances c’est bien, les mettre en œuvre, c’est mieux ! L’engagement d’un apprenant n’est totalement abouti que lorsqu’il a utilisé ses connaissances acquises en formation dans son activité professionnelle. Ce passage de la formation au travail, a un nom en pédagogie : le « transfert pédagogique ».

Certains dispositifs d’engagement sont centrés sur ce moment clé du processus d’apprentissage. Ils sont assez récents et sont issues des travaux de recherche en économie comportementale sur le « Nudge ». Le Nudge en formation, c’est littéralement, « donner un petit coup de coude à l’apprenant » pour qu’il applique dans son activité ce qu’il vient d’apprendre.

Ces dispositifs prennent donc la forme de mise en œuvre de plan d’action et de relance par des plateformes de micro doing qui vont séquencer des actions à réaliser à la semaine et au mois. Ces actions peuvent être ensuite contrôlées par un tuteur ou un manager d’un clic via une appli sur smartphone ou tablette.

Cette version digitalisée et moderne de l’accompagnement au transfert pédagogique peut être réalisée également par une médiation humaine : le manager évidemment, mais aussi un tuteur ou le formateur lui-même. Il leur revient alors de faire d’aider l’apprenant à bâtir un plan de suivi de leur formation et de le mettre en oeuvre.

Les dispositifs d’engagement centrés sur le transfert pédagogique constituent une véritable tendance en formation. Des start-up s’y sont engouffrées. Pour l’instant, il est encore tôt pour en mesurer les effets. Elles paraissent pertinentes a première vue plutôt pour des formations de commerciaux ou de managers ou le développement de soft skills. Elles sont d’un certain point de vue complémentaires des dispositifs d’engagement de type Quiz ou ludopédagogie puisqu’elles sont centrées plutôt sur des savoir-faire et savoir-être. Reste que leur côté répétitif et contrôlant (pour tout dire « behavioriste ») peuvent lasser à la longue. Les solutions plus traditionnelles reposant sur la médiation humaine semblent de ce point de vue plus pertinentes. Mais elles sont beaucoup plus coûteuses.

Marc Dennery

Marc Dennery

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