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2022 : Trois convictions et beaucoup de questions pour la formation en entreprise

En ce début d’année, on peut s’interroger sur ce qui attend le monde de la formation en entreprise en 2022. Depuis la crise sanitaire, jouer au prévisionniste est de plus en plus aventureux. Mais nous allons nous y risquer dans ce post. En partie seulement, car derrière quelques convictions fortes, nous avons aussi beaucoup d’interrogations…

Conviction #1 : on n’échappera pas à une nouvelle réforme de la formation

Un peu plus de trois ans après sa promulgation, il est beaucoup trop tôt pour tirer le bilan de la loi Avenir Professionnel. Mais une chose est sûre, on n’en restera pas là. D’abord, la dérive financière, passée la crise sanitaire, finira bien par être prise en compte. Ensuite, l’élection présidentielle ne sera pas sans effet sur le contexte réglementaire de la formation.

Concernant les déficits du budget de France Compétences, ils s’élèveraient, selon un article très documenté du centre-inffo , à un peu plus de 2 milliards d’euros pour 2021 et serait supérieur à 3,7 milliards d’euros pour 2022. Sachant que les fonds affectés à France compétences tournent autour de 9,5 milliards d’euros, la question de la dette finira bien par se poser.

Il ne faut pas être sorcier pour savoir qui la creuse : l’alternance et le CPF. Concernant l’alternance, intervenir ne sera pas facile. Il en va de l’insertion professionnelle de notre jeunesse.

Concernant le CPF, la question sera certainement moins taboue, même s’il sera difficile de briser l’élan engagé. Mais de nombreux leviers d’action peuvent être utilisés : restrictions des formations éligibles, mise en place d’un principe de ticket modérateur, limitation du démarchage, durcissement des critères Qualiopi…

Bref, quel que soit le nouveau gouvernement qui sortira des urnes, on n’échappera pas à une nouvelle loi. Pas en 2022, mais certainement en 2023. Et les grands préparatifs s’engageront dès la rentrée 2022. On sait l’importance des diagnostics préalables aux lois sur leurs orientations. Pour les directions de formation et encore plus les organismes de formation, dès la rentrée 2022, il sera nécessaire de scruter du côté des débats s’engageant autour de la future réforme.

Quelle politique CPF engager ? Faut-il créer son CFA ? Quelles stratégies à l’égard des entreprises de 50 à 250 salariés ? Les Régions reviendront-elles dans le jeu ? Les partenaires sociaux seront-ils mieux représentés dans la gouvernance de la formation ? Combien d’OPCO et pour quoi faire ? Quels arbitrages budgétaires au profit des salariés vs des demandeurs d’emploi ? Quelles orientations des fonds au profit de l’accompagnement vs de la formation ?… Les questions ne manquent pas derrière la réforme annoncée.

Conviction #2 : on ne se formera plus jamais comme avant

Deux ans de crise sanitaire (au minimum ?) laisseront des traces profondes dans les usages de formation. Soyons clair, le tout distanciel ne sera pas forcément la norme demain, mais une chose est sûre le tout présentiel non plus. On se dirige inéluctablement vers la multimodalité voire la commodalité (cf. notre article sur le sujet) et aussi notre formation certifiante pour devenir Formateur Multimodal – cliquez ici.

Mais là aussi de nombreuses questions persistent. La distancialisation de la formation ne s’est pas traduite directement par la digitalisation des contenus de formation. Autrement dit, on a formé via des classes virtuelles mais les organismes de formation traditionnels ont été peu nombreux à passer le cap de l’autoformation via des cours en ligne. Seuls de nouveaux entrants ont réellement investis cette modalité (cf. notre vidéo sur les trois marchés de la formation).

Il en est de même de l’AFEST. Il y a un véritable engouement pour cette modalité de formation à la fois au poste de travail et formelle, mais son industrialisation et sa généralisation a été fortement retardée par les confinements et les limitations de rencontre sur le lieu de travail (cf. notre article et nos formations certifiantes sur le sujet).

Dans le domaine pédagogique, les questions restent donc encore nombreuses : quelle sera la proportion d’autoformation via des cours en ligne une fois la crise sanitaire totalement terminée ? La classe virtuelle qui est à la fois très prisée et très décriée trouvera-t-elle sa place dans un monde de la formation en entreprise post restriction de déplacement ? Les grandes entreprises vont elles s’approprier l’AFEST ? Et si oui, à quelle vitesse l’AFEST sera-t-elle digitalisée ? A quoi servira le présentiel dans un monde de formation multimodal ? Verrons-nous le retour du résidentiel post crise sanitaire ? Le concept d’organisation apprenante deviendra-t-il une réalité ou restera-t-il pour la deuxième fois en 30 ans un doux rêve de directeurs L&D ? Et si l’organisation apprenante devenait une réalité, qu’en serait-il alors du rôle du manager dans la formation de ses équipes ? …

Conviction #3 : Organisme de formation : il y aura des gagnants et des perdants

On avait rarement vu autant de bouleversements sur le marché de la formation que ces dernières années. Et la Covid-19 n’est pas la seule cause. La réallocation des budgets formation vers l’alternance (+50% environ) et surtout le CPF qui a plus que doublé y est une lame de fond bien plus puissante.

Conséquence : certains organismes leaders hier sont aujourd’hui au plus mal, d’autres mineurs voire inexistants ont des croissances à deux chiffres quand ce n’est pas trois chiffres !

Le tournant des années 2020 va marquer durablement le marché de la formation. Notre conviction est que les organismes de formation qui étaient positionnés sur le marché de la formation présentielle de courte durée (le stage de 1 à 3 jours) vont être (sont déjà ?) très fortement impactés. Se reconvertir leur prendra du temps. Temps, qui pourrait être préjudiciable si les nouveaux entrants sont capables de faire une « blitzkrieg ».

Mais là aussi derrière cette conviction, les questions restent nombreuses : combien de temps l’argent facile sur le CPF perdurera-t-il pour les organismes de formation qui se sont engouffrés sur ce marché ? Comment vont s’opérer les rapprochements entre les Ecoles et les organismes de formation en entreprise qui lorgnent chacun de leur côté sur l’immense marché de l’alternance ? L’AFEST et plus largement la formation terrain vont elles remettre en cause durablement l’exception française de la formation courte et opérationnelle ? Les « pure players » du digital learning vont-ils percer sur le marché de la formation en entreprise ou préfèreront-ils se cantonner au marché du « Pro-Perso » offrant un patchwork de cours de développement personnel, de management, de langues, de bureautique  et de développement informatique mais aussi de musique, de bricolage, de cuisine… ?

Au terme de cet article, nous avons conscience de vous laisser avec davantage de questions que de réponses. Mais nous espérons, grâce à nos interrogations, vous avoir proposé des pistes d’investigation. Si tel était le cas, notre objectif serait atteint. Car en tant que formateur, notre métier quotidien n’est-il pas d’amener les apprenants à s’interroger et à chercher leurs propres réponses plutôt que de livrer toutes faîtes nos recettes ?

Bonne année 2022 de la part de toute l’équipe C-Campus !

Marc Dennery

Marc Dennery

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