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Animer une séquence de régulation en formation

Un groupe en formation peut être assimilé à un être vivant : il naît, grandit et se développe (mais parfois, il peut aussi régresser), et il finit par mourir (souvent dans des effusions affectives et plus rarement, dans une indifférence polie).

En psychologie, on désigne sous le terme de “dynamique de groupe”, ce phénomène de vie de groupe en formation. C’était un sujet très en vogue dans les années 1970 / 1990. Mais avec l’irruption du digital, il est passé au second plan. À tort selon nous ! Et chez C-Campus, nous continuons à mettre l’accent sur cette thématique dans nos formations de formateurs.

Nous avons traité ce thème de la dynamique de groupe dans un article, déjà ancien – cliquez ici. Cette fois-ci, nous allons faire un focus sur la régulation de la dynamique de groupe, en situation de crise.

Les situations de crise en formation sont rarissimes. Et dans une vie de formateur, on les compte sur les doigts d’une ou de deux mains. Mais savoir comment les gérer, nous conduit à oser les affronter. Conséquence, on développe une posture plus sereine en animation et le comportement du groupe s’en trouve positivement influencé. Voici les 5 étapes à suivre pour réussir une séance de régulation de la dynamique de groupe ,en situation de crise.

1- Faire un point de fixation

Avant que la crise ne se déclenche, des signaux faibles apparaissent. Le plus souvent, il suffit de les détecter et de réagir rapidement pour éviter le pire (cf. nos articles sur le sujet ici et ). Mais parfois, la tension monte, au point où la formation ne peut plus se dérouler dans des conditions correctes. C’est le moment que vous allez choisir pour engager votre séance de régulation.

Vous arrêtez alors le cours normal de votre formation et vous annoncez sans autoritarisme et sincèrement que la formation ne peut plus continuer ainsi et que vous souhaitez échanger avec le groupe, de la situation à laquelle il est confronté.

A noter : pour en arriver à stopper votre formation, la situation doit être devenue très délicate. C’est par exemple un groupe qui est aux “abonnés absents”. Il ne répond plus quand vous l’interrogez, il joue avec ses doudous numériques en permanence, ça rentre et ça sort dans la salle pour des prétextes peu convaincants, etc. Cela peut prendre aussi la forme de tensions interpersonnelles entre plusieurs membres du groupe (logique de clan et non pas de problèmes seulement entre deux personnes). Ou cela peut encore se traduire par des critiques acerbes et répétées de l’entreprise ou du contenu de la formation.

Pour réussir ce déclenchement de la séquence de régulation, 3 points sont à respecter :

  1. Se mettre au niveau du groupe: vous recherchez à établir une « relation Adulte-Adulte », il est donc impératif de vous mettre physiquement à la hauteur du groupe. Idéalement, si votre groupe est organisé en U, vous prenez une chaise et vous vous asseyez devant le groupe pour symboliquement fermer le U.
  2. Annoncer clairement l’objectif : le groupe doit comprendre qu’on n’est plus dans le cours normal de la formation et qu’on ne va pas continuer, comme si de rien était. Vous devez donc annoncer expressément que la situation ne peut plus perdurer et que votre objectif est d’échanger et d’écouter pour trouver une solution pérenne, afin que le groupe évolue à nouveau dans un climat d’apprentissage serein.
  3. Rester calme et rationnel : il ne s’agit pas de faire preuve d’autoritarisme (vous êtes seuls, ils sont un groupe !) ni de se poser en victime (le chantage affectif ne fonctionne pas longtemps avec un groupe en formation !). C’est en formateur ou formatrice responsable, que vous agissez. Ce n’est pas pour votre bien, mais pour le bien du groupe. L’important sera de trouver une solution qui permettra à tous de sortir gagnant et de repartir sur des bases solides, pour que la formation se passe bien. Votre attitude, ce que vous dégagez à ce moment-là, doit exprimer calme, sérénité mais aussi détermination dans l’envie de trouver une solution.

Exemple : ce que vous pouvez dire au moment du point de fixation : « Ah ! j’ai l’impression qu’on n’avance plus très bien ensemble. Je vais m’assoir et je vous propose qu’on prenne 5 minutes pour qu’on comprenne ce qui se passe et comment on peut repartir ensemble sur des bases solides ».

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2- Exprimer son ressenti et poser rationnellement le problème

Maintenant que vous êtes assis et que le groupe sait qu’on va échanger sur la situation qui s’est dégradée, vous allez devoir poser le problème dans les termes qui sont les vôtres. Pour cela, vous allez parler « Je » et dire sans émotion, ce que vous ressentez.

Il s’agit alors de partir de faits concrets et indiscutables et de dire en quoi cela vous perturbe et perturbe également la formation.

Exemple d’expression du ressenti et de cadrage du problème pour un groupe « apathique » : « Cela fait plusieurs fois que je vous interroge et vous ne répondez pas. Je vous vois regarder vos notifications. Je ne sens pas une grande motivation sur le sujet.  J’ai l’impression que vous faites autre chose… Cela me pose problème. J’aimerais que vous me disiez ce que vous-mêmes vous ressentez ».

3- Analyser le problème rationnellement

Quand vous donnez la parole à un groupe en difficulté et même en crise, naturellement vous vous exposez au “grand déballage”. C’est normal et il ne faut pas le craindre. Là aussi deux points d’attention sont à garder en ligne de mire :

  1. Eviter de patauger dans le ressenti affectif. C’est important que chacun exprime ce qu’il ressent, mais il faut toujours garder le leadership et essayer de ramener le plus vite possible le groupe à l’analyse rationnelle de la situation. Il faut à tout prix éviter les règlements de compte, les « c’est la faute à l’un ou à l’autre » et les « Yaka-Fokon ».
  2. Reformuler et trouver un consensus sur les causes rationnelles du problème. C’est l’exercice le plus difficile : résumer les points de vue divergents et trouver un point d’accord commun sur ce qui fait que l’on en est arrivé à la situation de crise. Comme le dit l’adage : « un problème bien posé, c’est un problème bientôt résolu ! ». Soigner les reformulations de l’expression, c’est essentiel à ce moment de l’échange.

A noter : il peut arriver, mais c’est exceptionnel, que le groupe persiste dans son silence. Il refuse de s’exprimer. Dans ce cas vous devrez insister pour le relancer (par exemple en observant un grand et long silence). Généralement, il y a toujours un membre du groupe qui finit par prendre la parole. Il vous suffit alors de reformuler ses propos et d’inviter le groupe à réagir… Sauf cas extrême, le débat s’enchaîne alors.

4- Rechercher les solutions en commun

Une fois le problème bien posé, il est temps de passer aux solutions. Évidemment, plus la solution viendra du groupe, plus vous aurez de chances de la voir mise en application. Il ne faut pas craindre de faire face à deux difficultés à ce moment-là :

  1. Voir émerger des solutions contradictoires entre elles. Il est rare évidemment qu’une seule solution émerge et que tout le monde la trouve acceptable. C’est généralement l’inverse qui se produit. Les solutions fusent et les oppositions naissent. Encore une fois, il faut rester calme. Noter sur le tableau toutes les solutions (même les plus iconoclastes), puis une fois le groupe partiellement apaisé, l’inviter à trouver une solution émergente (fruit des solutions notées) plutôt que de voter pour celle qu’il préfère (le vote a tendance à polariser les opinions plutôt que de favoriser la créativité du groupe).
  2. Être indirectement critiqué par le groupe. Parfois les solutions proposées par le groupe peuvent remettre en cause le contenu de votre formation ou votre pédagogie, voire votre attitude à son égard. Sans démagogie, si vous sentez que la critique est juste et légitime, il ne faut pas hésiter à l’accepter et à le dire. Le groupe sera toujours reconnaissant de votre humilité.

5- Contractualiser les solutions

Cette cinquième et dernière étape permet de conclure la séance sur un accord clair et solide. Pour ce faire, il ne vous reste plus qu’à :

  1. Reformuler la ou les solutions choisies : si nécessaire, en les écrivant au tableau pour qu’elles soient bien enregistrées de tous,
  2. Montrer les bénéfices de la solution pour chacun et pour tous.

Généralement, cela vous conduit à revoir le contrat pédagogique que vous aviez établi avec votre groupe au démarrage de la formation. Il ne faut pas craindre alors de changer ou compléter les règles de vie ou de modifier certaines parties du programme et certaines activités pédagogiques choisies.

Pour montrer votre engagement à tout mettre en œuvre pour repartir sur ces nouvelles bases solides, il est important d’indiquer au groupe que l’on refera un point un peu plus tard dans la formation, pour s’assurer que le « contrat pédagogique » est bien respecté.

Déclencher une séquence de régulation en situation de crise en formation ne doit pas être vécu comme un échec. C’est tout simplement un moyen pour redémarrer une nouvelle dynamique de groupe, sur des bases solides. Tout humain a ses affects et, ne l’oublions pas, un groupe en formation est un collectif d’humains. Il doit donc vivre avec ses affects. Les nier, ce que l’on aurait tendance à faire à l’ère du digital et de l’IA, c’est nier ce qui fait notre spécificité et notre humanité. Vivre avec, les réguler et en faire un vecteur d’apprentissage, c’est une mission fondamentale des formateurs et formatrices. Car, apprendre, n’est pas simplement un processus cognitif froid et rationnel, c’est aussi un processus motivationnel, où les dimensions de plaisir et le sentiment d’appartenance restent déterminants.

La technique d’animation d’une séance de régulation fait partie de l’une des 35 techniques que nous proposons dans notre jeu de cartes MASTER FORMATEUR© . Ce jeu de cartes fourni dans nos formations de formateurs est un super goodies à offrir à votre communauté de formateurs occasionnels. Découvrez-le ici ou contactez-nous pour des achats groupés : formation@c-campus.fr.

Marc Dennery

Marc Dennery

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