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Réforme de la formation : vers la fin du stage inter-entreprise ?

Le stage inter-entreprise né avec la loi Delors de 1971 va-t-il disparaître avec la loi “Avenir professionnel” de 2018 ? C’est fort probable, si les organismes de formation ne savent pas le ré-inventer à temps.

Le stage inter-entreprise en danger !

Plusieurs signaux faibles laissent à penser que le stage entreprise est en danger :

La fin des co-financements

Jusqu’à la loi “Avenir Professionnel”, le stage inter-entreprise était grandement co-financé. Dès les années 1970 à travers le plan de formation obligatoire, puis dans les années 2000 via le DIF et la période de professionnalisation, et suite à la loi de 2014 via le “CPF en heures”.

Demain, il ne sera plus financé que pour les entreprises de moins de 50 salariés. La Pro-A sera mise en oeuvre à travers des formation longues proches du contrat de professionnalisation. Plus particulièrement, tel qu’il a été déployé de façon expérimentale via des dispositifs comme Prodiat ou Vision Pro.

Un modèle économique peu évident

Le stage inter-entreprise coûte cher à l’entreprise et en même temps est très onéreux à produire pour l’organisme de formation. Outre les coups pédagogiques souvent très élevés (certaines grandes entreprises ont trouvé l’astuce de faire des inter en intra au sein de leur société, mais le gain reste limité), les entreprises doivent rajouter les frais de déplacements et d’hébergements mais également les frais de gestion (planification, replanification, facturation…). L’AFEST et la formation à Distance sont sans commune mesure plus économiques.

Du côté des organismes de formation, le stage inter-entreprise engendre des coûts périphériques non négligeables : marketing de l’offre, gestion administrative élevée (un stagiaire, une facture !), coûts de location de salles… Tout ceci a beau être répercuté au client, la marge reste fortement liée au temps de remplissage.

Des usages pédagogiques d’un autre temps

Last but not least, le stage inter-entreprise ne semble plus être au goût du jour. Partir en formation pendant deux ou trois jours, c’est déjà compliqué ! Etre avec  8 à 12 collègues et un formateur omniprésent qui déroule son programme, c’est carrément insupportable pour beaucoup de cadres et techniciens débordés. Ils n’ont plus le temps d’ailleurs de se former, mais cherche simplement à obtenir les réponses à leurs questions et à résoudre leurs problématiques. L’accompagnement, les communautés d’apprentissage, les réseaux et clubs de professionnels… voire tout simplement Google! ou Linkedin sont beaucoup mieux appropriés  que le stage inter-entreprise.

Le stage inter-entreprise, un modèle à réinventer

Le stage inter-entreprise a été bâti autour d’un modèle pédagogique unique : le “groupe-classe”. Un formateur-expert intervient devant un groupe de 8 à 15 personnes sur un thème d’actualité et/ou sur les fondamentaux du métier. Il délivre en un temps record un contenu important à des stagiaires au profil très hétérogènes. Comment répondre dans un stage de management à la fois aux demandes d’un cadre d’un grand groupe ex-nationalisé et à un technicien supérieur animant une petite équipe pour la première fois dans une PME de 50 personnes ?

L’avenir du stage inter-entreprise passe par la personnalisation. Chacun doit pouvoir venir avec sa problématique et repartir avec ses solutions.

Cela n’est possible qu’à condition de casser le modèle du groupe-classe et de la formation classique :

  • Unité de lieu – la même salle,
  • Unité d’action – la même activité pédagogique en simultanée,
  • Unité de temps – un seul regroupement de un, deux ou trois jours.

Un parcours inter-entreprise personnalisé, c’est :

  • Un positionnement amont à travers un entretien approfondi avec un pédagogue qui aide à poser sa problématique d’apprentissage et définir un parcours de formation particulier,
  • Un ou plusieurs temps de regroupement à raison d’une journée à chaque regroupement (peut-on partir plus longtemps en formation aujourd’hui ?),
  • Des activités d’apprentissage propres à chaque apprenant lors des regroupements qui peuvent avoir lieu aussi bien via des modules de Digital Learning en présentiel, que de l’accompagnement en face à face avec son formateur ou encore des temps de production en petit groupes avec des collègues ayant les mêmes centres d’intérêt,
  • Des activités de découverte ou de renforcement en digital learning entre les regroupements via des webinars, communautés d’apprentissage, consultation de MOOCs…
  • Une validation des acquis en aval de niveau 2 (“connaissance”) jusqu’à 4 (“performance”) selon le modèle de Kirkpatrick.

Ce modèle d’une “pédagogie personnalisée” va bien plus loin que le simple blended learning. Chacun avance à son rythme tout en restant dans un collectif d’apprentissage. La personnalisation se traduit non seulement par des modules de E-Learning particuliers mais également par des activités pédagogiques sur le lieu de formation propres à chacun.

Le réseau des APP (Ateliers de Pédagogie Personnalisée) ou celui des Pôle Formation de l’UIMM via les IFTI (Ilots de Formation Technique Individualisés) ont développé depuis de nombreuses années ce type de modèle pédagogique. Cela nécessite :

  • de repenser les centres de formation en espace de Co-Learning,
  • d’avoir une offre riche de contenus digitalisés,
  • et surtout d’accompagner les formateurs à adopter une posture de médiateur ou accompagnateur vers le savoir plutôt que de transmetteur de connaissances.

Les transformations nécessaires à conduire ne sont pas aisées, mais les bénéfices sont nombreux :

  • Réponse aux nouvelles attentes de personnalisation (“mon besoin, ma formation”) tout en restant dans une dimension collective forte (regroupement dans des espaces de co-learning conviviaux ou les échanges restent nombreux et riches entre participants),
  • Flexibilité de l’organisation des formations : les temps hors de l’entreprise restent limités,
  • Optimisation des taux de remplissage des formations : plusieurs personnes suivant des programmes différents peuvent être accompagnés par un même formateur lors d’un regroupement,
  • Appropriation facilitée du digital learning comme outil d’apprentissage : on utilise au démarrage le digital learning accompagné par un formateur ou un tuteur,
  • Etc.

Cet article a été publié sous forme de tribune sur news tank rh management. Pour découvrir les services de cette agence d’information globale, n’hésitez pas à demander un test gracieux de notre part en cliquant sur le lien ici.

Marc Dennery

Marc Dennery

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