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Direction L&D : à quel stade de développement êtes-vous ?

La fonction formation, aujourd’hui renommée direction L&D pour Learning and Development, fête ses 70 ans (le G.A.R.F – Groupement des acteurs et responsables de formation – l’association de référence en France est née en 1954).

Au fil des décennies, ses enjeux et ses politiques ont bien évolué. À l’heure où elle est particulièrement challengée (contraintes budgétaires, digitalisation et IA, nouvelles approches pédagogiques et surtout nouvelles attentes des apprenants et de leurs managers), nous vous proposons un survol historique des grandes évolutions de cette fonction. Chacune des 4 grandes phases représente d’une certaine manière un stade de développement à partir duquel une entreprise peut évaluer sa fonction formation et établir ainsi de nouvelles stratégies de développement.

A noter : dans la réalité des entreprises, les stades de développement supérieurs d’une fonction formation ne chassent pas le ou les précédents. Les fonctions formation efficientes sont celles qui intègrent à chaque stade suivant les stades précédents. A contrario, les directions L&D qui privilégient un type de développement particulier peinent à créer de la valeur pour leur entreprise.

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1960-1980 : le temps de la formation stagifiée et planifiée (ou le stade 1 de développement)

La fonction formation est née en France sous l’impulsion d’un cadre juridique de plus en plus incitatif et de besoins en qualification de plus en plus forts liés à la croissance économique des « Trente glorieuses ».

On passe d’une formation sur le tas (« Compagnonnage », « TWI ») à une formation stagifiée et planifiée. Les premiers services formations développent en interne et/ou, le plus souvent, achètent des stages de formation. Ils les organisent et les planifient sous la forme de stages de courtes durées.

La création de valeur de ces fonctions formation émergentes réside dans leur capacité à concevoir et gérer au mieux des catalogues de formation de plus en plus fournies répondant à l’élévation des compétences des managers et techniciens.

Ce premier stade du développement de la fonction formation a encore cours aujourd’hui dans les grandes entreprises et E.T.I. On ne parle plus de stages, mais de parcours. On crée des C.S.P (centre de services partagés) plutôt que des services locaux de formation. Mais, on planifie toujours des formations et on cherche à les produire de façon optimisée et à moindre coût. On compte les heures de formation et on les déclare dans les bilans sociaux ou autres bilans R.S.E. Les représentants du personnel émettent chaque année un avis sur la base de ces plans de développement des compétences. Et malheureusement, sauf exception, c’est quasiment les seules données qu’on leur propose d’étudier et d’analyser en matière de formation.

1980-1990 : le temps des universités d’entreprise (ou le stade 2 de développement)

A la fin du siècle dernier, sous l’influence d’une tendance venue d’outre-Atlantique, les entreprises les plus avancées dans le domaine de la formation ont développé en complément de leur service de gestion des stages de formation des universités d’entreprise.

A l’origine ces universités ont une double vocation :

  1. Former les managers et experts à haut potentiel en vue de les développer et les fidéliser,
  2. Devenir un espace de réflexion et d’innovation culturelle et sociale.

La seconde vocation qui consistait à faire de la R&D en ingénierie sociale et/ou à capitaliser sur les modes d’organisation et de management a eu du mal à résister à la succession de crises économiques, mais la première est restée longtemps un axe stratégique de développement RH.

Ces dernières années, les universités d’entreprise sont devenues moins élitistes. Symboliquement, elles ont abandonné les dénominations d’université, d’académie ou d’institut pour celui de « campus ». Grâce à la loi sur l’apprentissage de 2018, certaines sont mêmes allées jusqu’à créer leur CFA ou leur école d’entreprise pour faire face aux tensions sur le marché de l’emploi.

Ce deuxième stade du développement de la fonction formation n’a pas transformé en profondeur les cadres pédagogiques et managériaux de la production de formation. La plupart des universités d’entreprise ont leur centre de gestion de formation intégré qui gèrent et planifient des parcours. Elles évaluent leur impact à l’aune de critères bien connus des fonctions formation de stade 1, tels que la satisfaction des apprenants ou l’acquisition de connaissances.

Ce sont surtout les moyens et les cibles qui ont changé. Et aussi, l’internalisation de la production des formations. Au fil du temps, à la fois pour des raisons de développement de la culture d’entreprise et de contraintes budgétaires, les universités d’entreprise ont fait de plus en plus appel à des ressources internes de formateurs et formatrices. Certaines ont créé des équipes pédagogiques de niveau comparable aux meilleurs organismes de formation ou CFA.

2000-2010 : le temps de la digitalisation (ou le stade 3 de développement)

Le E-Learning pointe son nez dès la fin des années 1990. Mais il reste très coûteux (jusqu’à 100 K€ pour un module d’une heure). Il faudra attendre l’arrivée du Rapid E-Learning au milieu des années 2000 (via l’introduction notamment du logiciel Articulate) pour que la digitalisation s’impose progressivement dans le milieu de la formation.

À la fin des années 2000 et surtout dans les 2010 puis les années Covid, Les fonctions formation deviennent des gestionnaires de plateforme de digital learning. Leur création de valeur consiste à :

  • Sélectionner la meilleure plateforme (la fameuse L.M.S – Learning Management System),
  • Industrialiser à travers des « learning labs » la production des modules e-learning ou cours digitaux et / ou les acheter et les faire produire auprès des éditeurs et agences de digital learning,
  • Mettre en place le marketing de la formation qui va bien pour mobiliser les collaborateurs de l’entreprise à venir se former sur leurs plateformes (car reconnaissons-le, beaucoup de directions L&D ont été surprise de constater le faible intérêt pour leurs modules de formation digitaux !).

Sous l’effet de la digitalisation, les fonctions L&D ont été de plus en plus centralisées. Les services de formation locaux ont petit à petit disparu.

Le gestionnaire de formation, emploi-type de la fonction formation de stade 1 et le chef de projet formation, celui de la fonction formation de stade 2, ont laissé la place à l’ingénieur pédagogique : métier hybride nécessitant à la fois des compétences en conception pédagogique et des compétences en informatique et en graphisme.

Aujourd’hui, les fonctions L&D sont devenues matures dans le domaine de la formation digitale. Elles créent de la valeur en permettant au plus grand nombre de se perfectionner en permanence. C’est le grand rêve ATAWADAC (Any Time, Any Where, Any Device, An Content) qui devient réalité.

L’introduction de l’IA générative va leur permettre des gains de productivité non négligeables pour la production de modules. Elle va aussi faciliter la prescription et la personnalisation des parcours en fonction des profils des apprenants. Bref, le temps des formations catalogue du type « One size fits all » est révolu. Il ne faudrait pas croire pour autant que la digitalisation, la distancialisation et l’individualisation répondront à tous les besoins.

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2020 et suivantes : le temps de la « formation rapprochée » (ou le stade 4 du développement)

Les enjeux de la formation se sont déplacés ces dernières années :

  • Dans les années 1960/1970 : il fallait accompagner les cadres et techniciens faisant face aux évolutions technologiques et organisationnelles,
  • Dans les années 1980/1990 : on cherchait à perfectionner et fidéliser les meilleurs et créer une culture d’entreprise forte,
  • Dans les années 2000/2020 : la priorité était de donner accès à la connaissance au plus grand nombre et cela était enfin possible grâce à la digitalisation,
  • Aujourd’hui, l’enjeu est de faire face aux pénuries de compétences. La finalité de la formation est d’intégrer au plus vite et à moindre coût une population de collaborateurs toujours moins fidéle.

Face à ce nouvel enjeu, les entreprises cherchent à faire évoluer leur fonction L&D. Les pratiques sont encore en émergence. On peut les qualifier à travers la notion de « formation rapprochée ». Car pour réduire les coût et rendre plus flexible la formation, il s’agit de former les collaborateurs au plus près de leur travail : on se forme pour le travail et par le travail.

Il ne s’agit plus d’une simple formation sur le tas, comme l’était les formes les plus courantes du compagnonnage et du tutorat qui avaient cours avant l’introduction de la fonction formation, mais d’une formation intégrée au travail tout en étant encadrée pédagogiquement (via des accompagnateurs ou facilitateurs désignés et formés pour remplir leur mission).

Ses modalités sont aujourd’hui très diversifiées. On pense évidemment à l’AFEST institutionnalisée par la loi du 5 septembre 2018, mais elle ne s’y réduit pas. Il existe bien d’autres modalités de formation par le travail : le co-développement, l’action learning, le tutorat, le mentorat, le parrainage, etc. Pour aller plus loin, voir notre article ici et .

Aujourd’hui, les fonctions L&D sont peu à l’aise avec cette formation rapprochée.

  • Elles ont du mal à la tracer : comment enregistrer une heure de formation en situation de travail ?
  • Elles ont aussi du mal à l’organiser : le plus souvent les managers ne les attendent pas pour le faire à leur place !

Et pourtant, on sent bien à travers nos observations de terrain que des gains d’efficacité énormes sont à réaliser dans ce domaine. Former en situation de travail, ce n’est pas seulement montrer et faire refaire, c’est faire sortir de sa zone de confort, c’est faire réfléchir sur son action, c’est bénéficier de feedbacks pertinents, etc. Il y a une pédagogie de la formation en situation de travail, comme il y a une pédagogie de la formation présentielle ou distancielle.

La création de valeur des fonctions L&D atteignant ce 4ème stade réside par conséquent dans l’accompagnement du management dans le développement des apprentissages au plus près du travail.

L’emploi-type de ces nouvelles fonctions L&D est l’organisateur et facilitateur d’apprentissage en situation de travail. Ses compétences sont variées : elles vont de la compréhension fine des situations de travail propres à l’entreprise (ingénierie en didactique professionnelle) à la formation des tuteurs, accompagnateurs et managers aux techniques de réflexivité et de facilitation pédagogique, en passant par la conception de parcours hybrides mixant formations digitales, formations présentielles et mises en situations professionnelles apprenantes.

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Réaliser un bon diagnostic avec de s’engager dans la transformation de sa fonction formation

Beaucoup de DRH et Direction L&D s’interrogent aujourd’hui sur des questions telles que :

  • Faut-il investir davantage dans notre fonction formation ou au contraire réduire son budget ?
  • Faut-il centraliser ou décentraliser la fonction ?
  • Faut-il externaliser ou internaliser ?
  • Faut-il intégrer au plus vite l’IA ou attendre des solutions plus fiables et pérennes ?
  • Etc.

Ces questions sont loin d’être dénuées d’intérêt, mais pour y répondre encore faut-il connaître ses enjeux RH-formation et savoir à quel stade de développement se situe sa fonction L&D. Alors êtes-vous plutôt stade 1, 2, 3 ou 4 ? Et partant de votre diagnostic, quelle stratégie de développement de la fonction L&D devez-vous mettre en place ?

Marc Dennery

Marc Dennery