Dans un article précédent nous avons réalisé un premier tour d’horizon de 5 premières pratiques tutorales, complétant le “compagnonnage traditionnel” en entreprises. Nous abordons dans ce second article 5 autres approches. Elles permettent de revisiter ou de renouveler ses pratiques du tutorat.
6. Tutorat ludique : l’Escape Game de l’apprentissage ?
- Principe :
Dans cette approche, on élabore des scénarios ludiques, on utilise le jeu, type Escape Game ou jeu de rôles, pour amener des alternants en équipes, à simuler des situations réelles (on peut aussi faire travailler des apprenants à résoudre des problématiques concrètes).
Un tuteur-animateur guide le processus et s’assure que tous les apprenants participent.
L’utilisation de simulations en formation n’est pas nouvelle en soi (on entraine ainsi depuis la plus haute antiquité, les guerriers, soldats et autres gladiateurs ). Mais la “gamification”qu’on ajoute dans ce “tutorat ludique”, amène une émulation entre différentes équipes et renforce la dynamique de groupe ! - Exemple chez C-Campus :
Chez C-Campus, nous allons former à la rentrée plusieurs dizaines de tuteurs d’alternants chez un de nos clients, en utilisant durant une des séquences de la journée, un Escape Game pour tuteurs. À l’aide de notre jeu de cartes “Formateur Terrain”, les participants devront résoudre en équipes des énigmes sur la pédagogie puis répondre à un quiz sur les techniques de tutorat, la posture d’accompagnement, etc. Tout ceci dans un temps limité, bien sûr ! Parions que cela donnera aux tuteurs des idées pour animer leurs propres alternants “en jouant”… - Pour aller plus loin : La ludo-pédagogie est un des leviers pour développer l’engagement en formation !
Notre avis : La “gamification” se développe dans les pratiques de formation en entreprises. Sans en faire un gadget, tirons-en le meilleur profit du point de vue pédagogique…
Un peu de publicité en passant : dans nos formations, nous nous appuyons notamment sur nos “jeux de cartes” physiques. Nous en avons plusieurs à disposition : “Master formateur” pour les formateurs, “Formateur terrain” pour les tuteurs, “Accompagnateur AFEST” pour le déploiement d’AFEST. Ces outils pratiques peuvent aussi être utilisés pour animer de manière ludique, par ex. des groupes de formateurs occasionnels, des sessions de tuteurs & maîtres d’apprentissage, ou encore d’accompagnateurs AFEST etc. Contactez-nous pour découvrir nos formules “à la carte” (c’est le cas de le dire…) : formation@c-campus.fr
7. Tutorat inclusif : les différences, une force !
- Principe :
La diversité des profils d’alternants et de “néo-arrivants” dans les entreprises amène les directions Learning & Development à réfléchir à comment utiliser le tutorat pour encore mieux “inclure” des personnes “différentes” (migrants, personnes en situation de handicap, “décrocheurs” scolaires, etc.) Au delà de méthodes adaptées pour transmettre des savoir-faire et la culture d’entreprise, le tutorat inclusif amène en effet une nécessaire réflexion sur d’autres sujets :
– la prévention des pratiques discriminantes,
– l’évolution de nos mentalités et a priori et de nos représentations des “différences”,
– ou encore l’identification des bénéfices que l’entreprise et ses membres peuvent retirer de l’inclusion. - Exemple chez C-Campus :
À la demande de l’OPCO Afdas (et aussi parce que la question nous était posée par des participants dans nos formation de tuteurs), chez C-Campus nous avons décidé d’introduire dans nos formations au tutorat, la thématique de l’inclusion. Nous avons commencé en complétant nos contenus sur le tutorat (9 cours digitaux compatibles avec le référentiel MATU – Maître d’Apprentissage – Tuteur) par un cours spécifique portant sur les bonnes pratiques inclusives des tuteurs et tutrices. Nous abordons aussi, toujours en échanges et collaborations avec l’Afdas et cette fois la Fédération Française de Voile, la question de la professionnalisation des acteurs (pédagogiques) de l’inclusion. A ce jour, le sujet de l’inclusion reste encore complexe. Notre approche du tutorat inclusif est donc “en devenir”. Nous continuons à nous y intéresser et à explorer avec nos différents partenaires. - Pour aller plus loin : consulter la synthèse de l’AFDAS au sujet du 1er Forum inclusion économique dans le sport, le tourisme et le divertissement
Notre avis : L’inclusion est l’un des grands défis auxquels sont confrontée nos entreprises (également touchées par la transition démographique de cette première moitié du 21ème siècle). Dans ce contexte, un tutorat davantage inclusif est l’une des pistes de solutions.
8. Tutorat par le “réseau” : quelle place pour le mentor ?
- Principe :
Les réseaux sociaux internes sont utilisés pour se connaître et apprendre les uns des autres ou avec les autres. Les nouveaux arrivants s’y connectent d’abord pour lier connaissance avec d’autres. Tous les participants peuvent rejoindre des groupes de discussion autour d’intérêts, affinités ou sujets communs. Connaissances et expériences sont partagées, les apprenants posent des questions ou à l’inverse, y répondent, postent des idées ou des trucs/tips, réagissent ou discutent autour de thèmes les passionnant, etc.
Dans cette approche, rien de nouveau en soi : les réseaux sociaux internes d’entreprises existent quasiment depuis l’apparition des réseaux sociaux… tout court ! Pour que cela fonctionne pleinement, prévoir la présence indispensable de “mentors”, jouant quelque part la double fonction de pédagogues et de “community managers”, par exemple :
– pour lancer des nouvelles discussions et encourager les échanges,
– pour réguler parfois,
– amener de la “distance”, de la prise de hauteur, du recul etc., aux apprenants,
– éviter qu’ils se fourvoient dans de mauvaises directions d’apprentissage ou mésapprentissages, en poussant au contraire des “bons contenus” ou sources. - Exemple :
Un de nos clients “grand groupe” vient de lancer un réseau social dédié à ses alternants et apprentis, en plus du “parcours d’intégration dans la vraie vie” qui leur est proposé (et où ils se rencontrent physiquement) ainsi que de l’accès aux autres “réseaux” internes, ouverts à tous ses salariés. - Pour aller plus loin : La question de combiner cet apprentissage en réseau avec d’autres modalités (présentiel, AFEST, etc.) se pose bien entendu ainsi que celle de créer un réseau social, cette fois-ci pour les tuteurs et maîtres d’apprentissage, évidemment…
Notre avis : Dès 2015, nous nous sommes interrogés sur les bénéfices et les contraintes des “apprentissages en réseau”. Relisez ici notre article de l’époque sur les réseaux sociaux apprenants qui a certes un peu vieilli, mais pas tant que ça au fond…
9. Micro-apprentissages : défis du quotidien…
- Principe :
Concrètement, développer les micro-apprentissages, cela revient à lancer chaque semaine (voire chaque jour de la semaine) un challenge à relever à son alternant(e). Une campagne de micro-apprentissages présente plusieurs avantages :
– plus simple et flexible à organiser et à déployer par des tuteurs et tutrices opérationnels que des grands plans de formation que l’on aura parfois des difficultés à mettre en place,
– on peut aussi y ajouter une dimension ludique,
– les défis peuvent être collectifs,
– et puis les effets concrets des micro-apprentissages sont plus facilement mesurables et évaluables par les tuteurs opérationnels, que les “compétences” stricto-sensu… - Exemple :
Tel apprenti visant un bac pro “commerce” se voit fixer par son tuteur, le défi de “sourire à ses clients” lors de sa première semaine en entreprise…
- Pour aller plus loin : le principe des micro-apprentissages (micro-learning, micro-doing, etc. peu importe comment on l’appelle) doit toutefois être utilisé avec mesure. On vous l’explique dans cet article sur ses limites et une autre approche, aussi intéressante…
Notre avis : Pour un débutant, une activité professionnelle semblant simple voire basique pour les “pros” du métier, peut représenter un véritable défi. Surtout quand elle mobilise un peu de doigté, de savoir-être ou la connaissances de certains “codes” ou savoirs implicites… Les micro-apprentissages peuvent aider, notamment dans la phase de découverte du job par l’apprenant !
10. Tutorat Digital : l’IA arrive !
- Principe :
L’utilisation de solutions digitales pour “pousser des contenus personnalisés” à des apprenant, le recours au e-tutorat pour les suivre et éventuellement les stimuler et (re)motiver, ou encore les tutoriels mis à disposition, façon “recettes de cuisine” ou “l’informatique pour les nuls”, etc. tout cela n’est franchement pas récent … Disons que les technologies s’améliorent continuellement et que la gestion de la crise sanitaire Covid a accéléré la digitalisation des formations initiales, en particulier.
Aujourd’hui un jeune peut ainsi obtenir un diplôme jusqu’à bac + 5, en ayant suivi ses études 100% en distanciel-digital : avec zéro présentiel et sans avoir croiser un prof ou des condisciples “en vrai” ! - Exemple relevant encore de la prospective :
L’arrivée des intelligences artificielles en formation constitue probablement un nouveau tournant. Dans le sens où l’apprenant pourrait s’autonomiser dans son parcours et ne plus du tout dépendre d’un “sachant” en particulier. L’intelligence artificielle, c’est aussi peut-êtrel’ occasion de réduire les inégalités dans l’accès au savoir . En effet une IA pourra par exemple jouer plusieurs fonctions à la fois vis à vis de l’apprenant :
– Primo, le rôle de super assistant : pour gagner du temps, automatiser certaines activités, aider à mieux s’organiser, réaliser des travaux de recherche ou préparatoires assez rébarbatifs, etc.
– Secundo, celui de super enseignant, disponible H24 – 7 jours sur 7 : mobilisable en permanence par l’apprenant pour entretenir sa capacité “auto-réflexive” (l’art de cultiver ses questions à la machine) ou encore pour consacrer sa précieuse “mémoire de travail” à des activités d’apprentissages à forte valeur ajoutée, qui pourront pourquoi pas ouvrir à l’innovation…
– Tertio, celui de super tuteur-mentor, également disponible 24/7 : capable de personnaliser ses conseils et prescriptions d’apprentissages et aussi d’évaluer en évitant certains biais, propres aux humains…Bien sûr tout ceci n’est valable que si l’IA choisie dispose d’une “puissance” algorithmique, sache elle-même apprendre en ayant accès aux big datas, tout en restant contrôlable et licite, qu’elle soit reliée à des bases de savoirs et connaissances fiables, non tronqués, vérifiés, améliorés en permanence, etc. Bref une IA de qualité ! - Pour aller plus loin : lire par exemple ce rapport de l’UNESCO sur l’intelligence artificielle dans l’éducation
Notre avis : L’intelligence artificielle va bouleverser le monde de l’éducation et probablement aussi celui de la formation professionnelle. Apprendre par et avec l’IA, ce sera aussi l’opportunité d’apprendre ce qu’est l’IA elle-même et en quoi elle va changer profondément nos existences, en général !
Le temps gagné en apprentissage grâce à l’IA devra en revanche être ré-investi au profit d’échanges et d’apprentissages entre hommes et femmes “de chair et d’os”, dans les entreprises.
En effet l’apprentissage social est indispensable à l’être humain : nous avons par essence besoin de nos “semblables” pour apprendre réellement !