Le DIF a fêté ses 9 ans samedi 4 mai. Rarement un dispositif aura fait coulé autant d’encre et animé de débats aussi passionnés. Quel bilan peut on en tirer 9 ans plus tard ?
Si on devait résumer en une expression notre bilan du DIF, on dirait volontiers : “une idée géniale, très mal mise en oeuvre“.
Vers le co-investissement en formation
Le fondement du DIF est la co-construction du parcours de formation. Pour la première fois, salarié et employeur peuvent s’accorder pour choisir, dans une logique de co-investissement, la ou les actions de formation nécessaire(s) au développement du salarié. C’était une vraie bonne idée. Fini le dialogue de sourd autour de la formation, les salariés faisant ce qu’ils voulaient avec le CIF et l’employeur imposant la formation dans le cadre du plan.
Ce principe de co-construction aurait pu avoir des conséquences très positives : meilleur choix des formations et motivation accrue des salariés à se former. Exit la formation récompense, l’acte d’apprendre aurait dû être revalorisé. On devait en finir ainsi avec cette dépense obligatoire qu’était devenue la formation à la suite de la loi de 1971.
Malheureusement, en pratique, le DIF n’a permis qu’à la marge de développer le dialogue salarié – employeur autour de la formation. Reconnaissons-le, le DIF existe, s’est même banalisé, mais il n’est pas devenu ce grand dispositif qui devait concurrencer le plan.
Un dispositif mal compris
A cela une raison simple : aucun des trois acteurs clés du système de formation n’en a vraiment voulu et personne n’a fait d’effort pour le mettre en oeuvre.
- Les employeurs l’ont diabolisé. Pour eux, c’était le dispositif au coût exhorbitant qu’il fallait détourner. Les plus pro-actifs ont joué au bonneteau : les salariés croyaient avoir du plan, ils ont vu en fait leurs compteurs DIF décomptés. Les plus réticents ont fait comme si le DIF n’existait pas et on continuait à faire leur plan comme avant.
- Les salariés ont pu être séduits par quelques catalogues attractifs, mais dans l’ensemble, ils n’étaient pas prêts à faire de la formation hors temps de travail au delà d’une certaine durée. Ils ont préféré l’ignorer. Et finalement, ce n’est que lorsqu’ils craignaient pour leur employabilité qu’ils l’ont vraiment utilisé (rupture conventionnelle ou licenciement, portabilité, ou lorsque leur entreprise annonçait de mauvaises nouvelles).
- Les syndicats n’ont pas compris ce dispositif ambigu. Ils pensaient avoir conquis un nouveau CIF et en fait les textes conventionnels et législatifs le définissaient comme un plan amélioré. Et puis surtout, ils n’ont jamais pu le promouvoir car il était hors temps de travail. Ils ont préféré eux aussi, passer à côté plutôt que de se renier.
Au final, le DIF était certainement trop novateur. Il a révélé combien la loi de 1971 a fait de mal à la formation en la cantonnant à une dépense obligatoire, à un dû ou une contrainte, selon de quel côté on se place. L’idée de co-investissement ou de co-décision était à mille lieux de cette représentation de la formation. Le DIF demandait des efforts à chacun : investir de son temps pour les salariés, de son budget formation pour l’employeur et accepter que le dialogue salarié-employeur vienne compléter la négociation collective pour les syndicats.
Le DIF va certainement se fondre dans le CPF. Les entreprises seront soulagées et les syndicats rassurés. Pas sûr que les salariés y gagnent au final. En tous les cas, ils seront passés à côté d’une belle opportunité de développer leur capital compétence.

