L’IA générative est une force avec laquelle il faut compter. Mais si votre assistant IA, comme ChatGPT ou Claude, vous donne une réponse avec une assurance sans faille, est-elle pour autant correcte ? Les modèles de langage sont connus pour un phénomène particulier : l’hallucination, la production d’informations fausses mais plausibles. En tant que formateur, l’IA est une opportunité formidable pour accélérer la création de contenus pédagogiques. Cependant, il est essentiel de maîtriser ses faiblesses pour produire des supports fiables. Cet article vous propose de comprendre ce phénomène et de découvrir comment fiabiliser vos contenus de formation.
Comprendre les hallucinations et leurs implications pour la formation
Une hallucination d’IA se produit lorsque le modèle génère une information erronée avec la conviction d’un fait avéré. Pour un formateur, cette faiblesse est un enjeu majeur : une fausse donnée glissée dans un module e-learning ou une explication inexacte dans un support pédagogique peut être diffusée à des apprenants sans même que vous ne vous en aperceviez.
Prenons l’exemple d’un formateur qui crée un module sur les théories de l’apprentissage. L’IA pourrait affirmer à tort que le modèle VAK (Visuel, Auditif, Kinesthésique) est scientifiquement validé et universellement reconnu comme la référence. En réalité, ce modèle est largement remis en question par la recherche en neurosciences et pédagogie. Bien que cette affirmation semble plausible, elle est scientifiquement inexacte. L’intégrer telle quelle dans un module, c’est diffuser une méthode obsolète et potentiellement inefficace. Autre cas fréquent : l’IA peut inventer des références bibliographiques. Un formateur qui prépare une bibliographie sur un sujet pourrait se retrouver avec des références fantômes s’il ne les vérifie pas.
Mais pourquoi les modèles d’IA “hallucinent”-ils ? La raison principale est qu’ils ne “comprennent” pas ce qu’ils disent. Ils ne font que prédire la séquence de mots la plus probable en se basant sur leurs données d’entraînement. Si ces données sont erronées ou incomplètes, le modèle va parfois improviser pour combler le vide, créant une information de toutes pièces.
L’IA n’a pas de mécanisme de vérification des faits et privilégie la cohérence du discours sur la vérité. L’objectif premier d’un modèle de langage est de produire un texte qui soit cohérent, fluide et bien formulé, pour que la réponse paraisse logique et réponde à la requête de l’utilisateur. La “vérité” n’est pas une variable dans son algorithme. Elle n’est pas conçue pour dire « je ne sais pas », mais plutôt pour satisfaire l’utilisateur, quitte à inventer une réponse avec aplomb.
En formation, les risques sont concrets : diffusion de concepts erronés, perte de crédibilité et de confiance de la part des apprenants. Imaginez qu’un apprenant détecte une erreur factuelle dans un de vos cours. Votre crédibilité, et celle de votre organisme de formation, en prendrait un coup. Il est donc crucial de savoir comment tirer profit de l’IA tout en évitant ces écueils.
Stratégies pour fiabiliser les contenus générés par l’IA
Heureusement, il est possible de tirer le meilleur parti de l’IA en adoptant des stratégies de vérification rigoureuses. En tant que concepteur de contenu, votre rôle est de passer d’une simple utilisation à une véritable maîtrise de cet outil. Voici les principales méthodes pour fiabiliser vos supports de formation :
Croiser les sources d’information.
Ne tenez jamais pour acquise une information fournie par l’IA. Une donnée, une citation ou une statistique doit toujours être validée à l’aide de sources externes fiables. Vous pouvez consulter des ouvrages de référence, des articles académiques ou des sites officiels. Chaque information critique doit être vérifiée à l’aide de sources académiques, institutionnelles ou expertes reconnues.
Par exemple, si l’IA vous fournit une statistique, demandez à l’IA l’étude originale ou une mention sur un site de confiance avant de l’intégrer à votre présentation. Pour automatiser ce processus, des outils comme Google Scholar ou Crossref peuvent vous aider à valider l’existence et la traçabilité d’une information.
Intégrer une validation humaine systématique.
L’IA est un assistant puissant, pas un expert infaillible. Le point le plus important est de ne jamais diffuser un contenu généré par l’IA sans l’avoir relu intégralement vous-même, ou par un autre expert du sujet. Considérez le texte généré comme un brouillon que vous devez transformer en contenu final. Cette relecture doit être critique, en vous posant ces questions :
- Les faits sont-ils exacts ?
- Le ton et la pédagogie sont-ils adaptés à mon public ?
- Est-ce que je formulerais les choses de cette manière ?
Si un doute subsiste sur un passage, vous devez creuser la question ou simplement le supprimer.
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Adopter une approche hybride dans la production de contenu.
Pour limiter les risques, ne confiez pas la totalité du travail à l’IA. Utilisez-la pour ce qu’elle fait de mieux : la génération d’ébauches. Vous pouvez ensuite compléter et enrichir ce contenu avec votre propre expertise et des références solides. Un bon flux de travail peut être :
- Génération : L’IA rédige une première version du cours ou d’un quiz.
- Révision : Vous révisez et complétez le texte manuellement, en y ajoutant votre style et votre expérience.
- Intégration : Vous insérez des sources fiables (articles de loi, publications, témoignages) dans le contenu final.
- Validation croisée : Vous pouvez même utiliser plusieurs modèles d’IA (ChatGPT, Claude, etc.) pour vérifier la cohérence d’une information. Si un modèle diverge des autres, c’est un signal d’alerte.
Demander des explications et des citations à l’IA.
Dans certains cas, vous pouvez pousser l’IA à justifier sa réponse. Par exemple, si elle vous donne un fait, demandez-lui : « Quelle est ta source ? ». Des outils comme Bing Chat ou Perplexity AI citent souvent leurs sources. Si l’IA ne peut pas fournir de source fiable, vous devez considérer l’information comme douteuse. Cette approche, appelée “fact-checking par le prompt”, est une compétence à développer pour tout utilisateur.
Cultiver une posture critique à l’ère de l’IA
Au-delà des méthodes concrètes, l’intégration de l’IA dans la formation exige d’adopter une posture de vérification et de doute constructif. L’IA, aussi impressionnante soit-elle, doit être considérée comme un assistant puissant mais non dénué de failles. Le formateur est le chef d’orchestre de sa production de contenu, et son esprit critique doit être plus que jamais en éveil.
L’analogie est simple : considérez l’IA comme un stagiaire très doué mais parfois peu fiable. Il travaille vite et propose une multitude d’idées, mais il peut générer une erreur sans s’en rendre compte. De la même manière que vous ne laisseriez jamais un stagiaire inexpérimenté envoyer un support aux clients sans relecture, ne laissez pas l’IA “non supervisée” publier du contenu pour vos apprenants. Gardez toujours la main.
Cette posture critique est une compétence essentielle que vous pouvez également transmettre à vos apprenants. Eux aussi seront amenés à utiliser l’IA dans leur parcours, et il est crucial de les sensibiliser aux risques d’hallucination et à la nécessité de vérifier l’information. Faites-en un exercice pédagogique : montrez-leur une réponse générée par l’IA contenant une erreur subtile et demandez-leur de la déceler et d’expliquer comment la valider. Vous aiderez ainsi vos apprenants à développer leur esprit critique numérique, une compétence transverse indispensable dans le monde actuel.
L’IA n’est pas une source de vérité absolue, mais un outil au service de l’expertise humaine. Le formateur du XXIe siècle doit intégrer cette couche de vérification supplémentaire à son processus de travail. C’est un effort supplémentaire, mais il est indispensable pour garantir la fiabilité de vos formations.
En adoptant une démarche rigoureuse — vérification multi-sources, validation humaine, approche hybride — vous bénéficierez de l’accélération offerte par l’IA tout en évitant ses pièges. L’avenir de la formation appartient à ceux qui sauront combiner l’efficacité de l’IA et le discernement humain.
Le formateur reste le garant de la qualité et du sens, tandis que l’IA est un puissant instrument de productivité… à manier avec précaution !